Les vrais impacts d’un 
accouchement naturel sur l’allaitement. Mythes ou réalité?

Prendre rendez-vous
avril 19, 2017

L’impact d’un 
accouchement naturel sur le démarrage de l’allaitement

Les hormones qui interviennent dans la lactation sont essentiellement la prolactine et l’ocytocine. Autant la grossesse sert à mettre en place les structures pour permettre l’allaitement (grâce à l’action des œstrogènes et de la progestérone), autant l’accouchement sert à mettre en place le début de la lactation (par l’action de l’ocytocine et de la prolactine). Durant l’expérience de l’accouchement, chaque femme développe ses compétences maternelles et le bébé exprime les siennes, ce qui est le point de départ d’une longue relation et du lien d’attachement.

L’expulsion du placenta déclenche la sécrétion de la prolactine. L’ocytocine est sécrétée à différents moments pendant le travail pour favoriser les contractions de l’utérus. Elle active également certaines zones du cerveau de la mère pour favoriser des comportements maternels. Si les conditions d’intimité et de sécurité sont réunies, si l’accouchement n’a pas été perturbé ni les premiers moments entre la mère et le bébé, la mère aura un taux maximum d’ocytocine.

Lors de chaque tétée, le bébé stimulera également la sécrétion d’ocytocine pour relaxer sa mère et favoriser ainsi le lien d’attachement entre eux. Cette sécrétion d’ocytocine va aider le bon démarrage de l’allaitement.

À l’inverse, chaque intervention durant l’accouchement peut perturber cette sécrétion et venir compromettre le bon départ de l’allaitement, soit en affectant la production de lait directement, soit en affectant la confiance de la mère en ses compétences, soit en perturbant les réflexes du nouveau-né pour se placer au sein et donc en fin de compte affecter le lien d’attachement entre la mère et son bébé.

L’épidurale, intervention souvent demandée par les mères ou encouragée par le milieu hospitalier, fait en sorte que la mère ne sent plus ses contractions et dépend donc des autres pour savoir quand pousser, par exemple. Cela perturbe la sécrétion hormonale physiologique et affecte les compétences maternelles. Aussi, il faut penser que le bébé reçoit également cette épidurale. N’étant pas mature, cela peut lui prendre jusqu’à un mois pour éliminer toute trace d’épidurale de son corps. Le bébé peut donc être plus amorphe et ses réflexes pour l’allaitement peuvent en être affectés en rendant le début de l’allaitement plus difficile avec une succion moins efficace.

Autre impact de l’épidurale ou de tout autre médicament donné en soluté, c’est que le bébé en reçoit et va s’en retrouver « gonflé », avec un surplus de poids créé par ces solutés. Le poids à la naissance ne sera donc pas réel. À la prochaine pesée, alors que le bébé aura perdu cet excès de liquide, la chute de poids sera plus importante et cela peut amener le personnel médical à faire des interprétations erronées. Certains de ces bébés auront perdu le fameux 10 % critique qui nécessite des interventions pour éviter la déshydratation. L’épidurale est associée à une insuffisance de production de lait et à une supplémentation plus grande à la naissance, donc à un taux d’allaitement exclusif plus faible.

L’ocytocine de synthèse qui est parfois donnée aux mères pour déclencher le travail, ou stimuler les contractions, et souvent pour éviter des hémorragies, inhibe la sécrétion physiologique d’ocytocine. En affectant cette sécrétion, cela perturbe tout le processus physiologique et l’effet que l’ocytocine a sur le démarrage de l’allaitement, car le corps ne réagit pas de la même façon à l’ocytocine de synthèse.

Toute intervention pour aider le bébé à naitre, comme l’utilisation des forceps ou de la ventouse, vient créer des tensions au niveau du crâne chez le bébé. Or, la structure crânienne est très fragile et souple à la naissance pour pouvoir passer à travers le bassin de sa mère. Ces tensions musculaires ou nerveuses peuvent créer des inconforts chez le bébé et rendre l’allaitement douloureux pour le bébé ou la mère et donc compromettre le bon démarrage de l’allaitement.

Ceci pour ne nommer que ces interventions plus fréquentes. Mais chaque fois que la mère se fait déranger durant le travail pour vérifier l’état de son col, prendre les signes vitaux, ou replacer le moniteur, le processus hormonal est perturbé. Toute intervention a tendance à en amener d’autres et elles sont souvent faites de façon très routinière.

La rencontre de la maman et de son bébé à la naissance ne devrait pour aucune raison être perturbée, à moins de question vitale. Cela inclut le peau à peau à la naissance, durant les deux premières heures minimum, et le premier contact visuel entre la mère et son bébé. Le bébé nait avec tous les réflexes qui lui donnent les compétences pour ramper, grimper au sein et se placer tout seul. Il est capable de faire ce processus seul, et ainsi, développe ses compétences et va donner confiance à sa mère en ses compétences maternelles et en ses capacités de nourrir son bébé et d’en prendre soin. Cette étape est cruciale pour le bon déroulement de l’allaitement et le lien d’attachement entre la mère et son bébé. Cette séquence organise le bébé neurologiquement pour l’allaitement.

La première tétée ne devrait pas être accélérée ou forcée. Si tout a été fait de façon physiologique avant, le bébé ira au sein dans la première heure de vie. Mais bien souvent, ce moment est perturbé, soit par les interventions précédentes, soit par le personnel qui doit accélérer les choses pour respecter toutes sortes de protocoles.

Toute séparation perturbe la séquence physiologique, l’organisation du bébé et les compétences maternelles en retardant la première tétée ou en affectant son bon déroulement.

Comment favoriser un  accouchement  physiologique et donc un bon début d’allaitement ?
Il faut d’abord prendre le temps de choisir le lieu de naissance (domicile, maison de naissance ou hôpital) puis prendre également le temps de choisir le professionnel qui va suivre la grossesse et donc assister à l’accouchement (en sachant qu’un médecin ne sera là que pour l’expulsion du bébé dans la plupart des cas). Enfin, ce qui peut faire toute une différence est d’avoir une accompagnante à la naissance.

Des études scientifiques ont en effet démontré que la présence d’une doula augmentait le taux d’initiation de -l’allaitement à la naissance et la durée de l’allaitement à long terme tout en diminuant le nombre d’interventions pendant l’accouchement (autour de 50 % moins de césarienne, d’utilisation de l’épidurale et de l’ocytocine de synthèse). Cette ressource connaît les étapes physiologiques de la naissance, connaît le fonctionnement des hôpitaux et vous accompagnera tout le long du travail, de la naissance et du début de l’allaitement. Une accompagnante à la naissance est là pour vous informer, vous soutenir dans vos choix, protéger votre intimité à vous, votre conjoint et votre bébé et vous aider à cheminer dans cette expérience transformante qu’est la naissance.

Pour ce qui est de l’allaitement, les consultantes en lactation IBCLC sont les professionnelles de la santé qui en détiennent l’expertise. N’hésitez pas à faire appel à elles en prénatal pour avoir des réponses à vos questions ou à vos craintes. En postnatal, elles vous aideront à bien partir votre allaitement et à bien installer votre production de lait. N’attendez pas, au moindre inconfort, consultez, pour éviter que la situation ne s’aggrave.

Nous avons beaucoup parlé des impacts de l’accouchement sur l’allaitement, mais l’inverse est aussi vrai. L’allaitement réduit le risque d’hémorragie post-partum et aide l’utérus à retrouver sa forme plus vite grâce à l’ocytocine. Aussi, et qui n’est pas négligeable, l’allaitement diminue le risque de dépression post-partum grâce, entre autres, à la sécrétion d’ocytocine.

Marie-Caroline Bergouignan, consultante en lactation IBCLC

www.lasourceensoi.com