Allaitement et sexualité, quel est l’impact de l’un sur l’autre?
Vous êtes enceinte, votre ventre grossit au fur et à mesure que votre bébé y grandit. Vos relations sexuelles s’ajustent à chaque étape de la grossesse en fonction des défis que vous rencontrez et de vos désirs parfois changeants. Mais qu’en est-il pendant l’allaitement ? Une fois accouché, est-ce que tout retrouve sa place comme avant ? À quoi s’attendre ? Voici quelques réponses.
La période périnatale est un tout, on ne peut dissocier chaque étape. Chacune prépare à la suivante et est la conséquence de la précédente. La suite physio-logique des événements est grossesse-accouchement-allaitement. Cette période périnatale est une étape transformatrice de la vie. Elle est une longue période d’adaptation à un nouveau rôle et à de nouvelles responsabilités. Cette période nécessite une transformation et une réorganisation de notre vie. Tous ces changements ne se terminent pas à l’accouchement, mais plutôt plusieurs mois ou années après. Ici, nous nous limiterons à noter les changements pendant l’allaitement, en lien avec la sexualité. Le point commun des différentes étapes de la maternité est l’implication des hormones. Au niveau de l’allaitement, les hormones en jeu sont principalement la prolactine (pour produire le lait) et l’ocytocine (pour éjecter le lait).
La prolactine
Le niveau de prolactine étant élevé pendant la période de lactation, la sécrétion d’oestrogènes et de progestérone est limitée. Ce phénomène fait en sorte que les femmes qui allaitent ressentent souvent une sécheresse vaginale lors des relations sexuelles et que leur désir sexuel peut être plus lent à venir et moins intense. La libido a tendance à baisser les premiers mois à cause des hormones, de la fatigue qui s’accumule et des changements physiques. La prolactine va baisser au fil de l’allaitement et donc son effet va diminuer aussi. Le retour des menstruations participe aussi à diminuer cet effet.
Ce contexte hormonal va diminuer la fertilité de la femme et explique pourquoi il est communément dit que l’allaitement est un moyen de contraception. En fait, nous parlons ici de la méthode MAMA (Méthode de l’Allaitement Maternel et de l’Aménorrhée). Cette méthode est efficace à 98 %, comme une pilule contraceptive, MAIS certaines conditions doivent être respectées strictement :
- Le bébé doit avoir moins de 6 mois
- La maman doit allaiter exclusivement et à la demande jour et nuit (avec moins de 6h entre deux tétées)
- La maman ne doit pas avoir de retour de menstruation
Si une seule de ces conditions n’est pas respectée, une seule fois, la méthode n’est plus efficace. En fait, l’efficacité de cette méthode dépend du taux de prolactine, donc peut être trè variable d’une femme à l’autre.
Pour les autres méthodes contraceptives, il ne faut jamais oublier que toute méthode hormonale, quelle qu’elle soit, peut affecter la sécrétion de la prolactine et donc la production de lait, même la méthode la plus compatible avec l’allaitement. C’est pourquoi il est suggéré de commencer une méthode contraceptive après les 6 premières semaines d’allaitement ou quand l’allaitement est bien en place pour diminuer les risques d’affecter la production de lait. Aussi, la pilule contraceptive va être privilégiée pour pouvoir l’arrêter facilement et rapidement au cas où elle affecterait la production.
L’ocytocine
L’ocytocine, elle, est l’hormone de l’amour. Elle est sécrétée lors des relations sexuelles (pendant l’orgasme), lors de l’accouchement (pendant les contractions) et lors de l’allaitement (pendant le réflexe d’éjection). Elle est donc présente à chaque étape de la maternité. Ainsi, lors d’une relation sexuelle pendant la période d’allaitement, la femme pourra avoir un réflexe d’éjection au moment de l’orgasme. Aussi, pendant l’allaitement des premières semaines,alors que la sécrétion d’ocytocine sera stimulée, la femme sentira des contractions utérines qui permettront à l’utérus de retrouver sa forme plus rapidement. Certaines femmes, mais très rarement, pourront ressentir un orgasme pendant une tétée.
L’ocytocine est une hormone très sensible aux émotions, dont la sécrétion peut être influencée par la pensée, les odeurs ou le toucher. Ainsi, il suffit que la nouvelle maman pense à son bébé pour qu’elle ait un réflexe d’éjection ou au contraire, qu’elle vive un stress soudain pour inhiber son réflexe.
Les seins
À part les changements hormonaux, d’autres changements, beaucoup plus visibles, surviennent pendant la grossesse, l’accouchement et l’allaitement. Le corps garde des traces, parfois permanentes, de chaque étape, des vergetures, des cicatrices (au périnée ou au ventre, en cas de césarienne), une élasticité des tissus (du ventre ou des seins) ou des rondeurs.
Pendant l’allaitement, les seins vont changer, surtout au début, au cours de la montée de lait. Ils peuvent devenir plus volumineux, plus fermes, plus sensibles et rester ainsi les premières semaines, jusqu’à ce que la production de lait se stabilise selon les besoins du bébé. Alors, les seins redeviennent plus souples et moins volumineux. Certaines femmes vivront également des blessures aux seins ou des douleurs.
Ces changements seront vécus très différemment selon chacune et selon le conjoint également. Alors que certaines personnes trouveront du plaisir à ces changements, d’autres seront plutôt mal à l’aise ou inconfortables. La reprise des activités sexuelles peut se faire dès que le couple se sent prêt, à moins de conditions particulières à l’accouchement. Les femmes qui allaitent reprendraient leurs activités sexuelles plus vite que celles qui n’allaitent pas.
Pour la femme, les changements de son image corporelle peuvent être plus ou moins faciles à accepter, surtout que certains seront permanents. Ces changements peuvent être tout aussi difficiles à accepter par le conjoint qui voit sa femme se transformer. Ainsi, les deux partenaires découvrent le nouveau rôle des seins, celui d’organe nourricier et non plus seulement sexuel. Cette dualité peut amener une ambivalence ou un inconfort, mais peut aussi augmenter leur attraction. Chaque individu s’adaptant à un rythme différent et d’une façon différente, cela peut amener des conflits au sein du couple. Il est important de trouver un nouvel équilibre dans le respect de soi et de l’autre. Au fur et à mesure que le couple se familiarisera avec son nouveau rôle parental, les soins du nouveau-né et l’allaitement, le désir sexuel reviendra.
Les facteurs favorisant une bonne adaptation
L’adaptation peut s’étaler sur une période plus ou moins longue. Plusieurs facteurs vont influencer la facilité avec laquelle le couple va s’adapter et trouver un nouvel équilibre. Si chaque conjoint valorise l’autre dans son nouveau rôle, l’encourage à développer de nouvelles compétences, cela aidera le couple à rester proche et soudé. Aussi, le couple peut garder une certaine intimité physique sans avoir de relations sexuelles avec pénétration nécessairement, par exemple avec plus de caresses ou de câlins. Cela favorisera un retour à la vie sexuelle normale quand les deux partenaires seront prêts et aidera la femme à retrouver sa libido.
La communication entre les conjoints est essentielle pour partager les sentiments vécus, écouter l’autre dans sa différence et garder un équilibre. Le respect de chacun et de ses limites, de son rythme d’adaptation aidera à garder une intimité et à retrouver une sexualité normale. Chaque partenaire a besoin d’être rassuré par l’autre sur sa place dans le couple, dans la relation.
De plus, il peut être bon que chaque partenaire partage son vécu avec ses semblables de même sexe, entre amis ou dans des groupes de soutien comme un groupe de soutien en allaitement. Cela permet de briser l’isolement et de ne pas se sentir seul à vivre ces sentiments.
En cas de besoin, le couple ou chaque partenaire peut consulter des professionnels pour avoir de l’aide afin de traverser cette période d’adaptation de façon sereine. L’infirmière du CLSC peut aider à référer au bon service, sinon, il existe des sexologues ou des psychologues spécialisés pour la période périnatale. Il suffit de consulter le site internet de chacun des ordres professionnels.
Il est très difficile de séparer l’allaitement du reste de la période périnatale en matière de sexualité. Quand une difficulté se présente, le défi est de faire la part des choses et d’identifier ce qui appartient à l’allaitement ou à l’adaptation postnatale. La plupart du temps, l’allaitement n’est pas la cause du problème. Malheureusement, beaucoup de sevrages se font par erreur et sont regrettés par la suite en voyant que ça ne change rien au problème. Il est donc important de consulter avant pour se faire aider à y voir plus clair et prendre les décisions qui nous conviennent.
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Marie-Caroline Bergouignan
Consultante en lactation IBCLC